Spéléologie

LES MONTS DE SAINT-GUILHEM -1-

Photo : Vue panoramique des monts de Saint-Guilhem et de la vallée de l'Hérault. Au dernier plan, le roc de la Vigne, point culminant du massif.

 

 

"Tout ce qui s'admire sans peine au flamboyant soleil du midi n'est pas cependant le côté le plus original de la contrée. Les paysages constituent le recto; le verso gît dans les entrailles du sol, loin du ciel bleu; et il dissimule des merveilles dont quelques unes seulement se sont laissées entrevoir : grottes à stalactites immenses, longues de plusieurs kilomètres avec des rivières souterraines imparcourues, des lacs intérieurs ignorés, et revêtus d'un scintillant manteau de cristallisations. Tout un monde noir et cacé qui se transforme en palais féerique à la lueur du magnésium, fantastique à visiter, palpitant à découvrir. (E.-A. MARTEL, "Les Abîmes" (1890)."

 

 

Les monts de Saint-Guilhem le Désert sont situés dans le département de l'Hérault (Bas Languedoc) à l'extrémité méridionale du causse du Larzac au pied du mont Saint-Baudille (Alt : 848 m). Ils constituent à ce nouveau une succession de gradins altimètriquement décroissants, véritables amphitéâtres étagés au regard des gorges de l'Hérault et des garrigues Montpellièraines. Leur superficie est d'environ 50 Km2. Aucune route ne traverse le massif si ce n'est la D.32 à sa base, route qui longe les gorges de l'Hérault.

LES MONTS DE SAINT GUILHEM : UN CADRE EXCEPTIONNEL

Cette région que l'on a tendance a magnifier avec juste raison doit sa renommée internationale par à la présence de l'Abbaye de Gelonne (1) au sein du village de Saint-Guilhem le Désert, écrin moyenâgeux qui attire toute l'année de nombreux touristes venus du monde entier.

Située dans un cadre d'une splendeur remarquable, morphologiquement mouvementé par une histoire géologique scandée d'événements tectoniques majeurs, elle fait partie du jardin secret des amateurs de sites pittoresques ivres de solitude et de dépaysement. Très accidentés, et de ce fait peu accessibles au promeneur non averti, les monts de Saint-Guilhem invitent le touriste curieux avide de découverte à sortir de ses circuits touristiques traditionnels pour tenter l'aventure souterraine. Sillonnés par un réseau bien organisé de sentiers (empruntés jadis par les pèlerins de St Jacques de Compostelle) ils donnent la possibilité aux plus motivés, et au prix de quelques efforts, d'approcher aisément ses sites les plus remarquables.

Car, si l'on pousse en effet la curiosité au-delà du village de Saint-Guilhem et que l'on s'éloigne de son cadre mystique, le domaine de la Spéléologie s'ouvre à vos pieds. D'aucun prétendront que les cavités qui sillonnent cette région présentent peu d'intérêt et ne concernent que les amateurs de solitude ou autres ermites en quête d'abri. Ou bien, que seule la grotte de la Clamouse aux parures somptueuses et finement brodées mérite seule l'attention que lui porte la foule des touristes de plus en plus nombreuse qui y déferle...

En fait, si le domaine souterrain des Monts de Saint-Guilhem n'attire pas les foules et autres curieux de tout poil dans ses arcanes les plus secrets, c'est bien en raison de l'effort qu'il nécessite. Un effort que nous vous invitons à faire en compagnie de cet ouvrage. Vous y trouverez les renseignements nécessaires pour en découvrir le patrimoine et pour mieux aborder vos futures explorations souterraines.

(1) En 804, Guilhem, duc d'Aquitaine, moine bénédictin et éros de la chanson de Guillaume d'Orange, fonde cette abbaye qui prendra le nom de Gellone au XIIéme siècle.

ACCES

De Montpellier, prendre l'A75 direction Lodève jusqu'à Gignac. Quitter l'autoroute pour rentrer dans ce village. Continuer sur Lagamas par la D.9, puis vers Saint-Jean-de-Fos par la D.4.

A la sortie de Saint-Jean de Fos tourner à gauche. La route descend vers le débouché des gorges de l'Hérault sur la plaine et passe près du "Pont du Diable". Remonter les gorges en rive droite par la D.4, Saint-Guilhem le Désert n'est plus qu'à 3 Km.

ORIENTATION CARTOGRAPHIQUE

- carte routière Michelin No 83, pli 6.

- carte I.G.N touristique No 65 (Béziers-Montpellier) au 1/100.000.

- guide Michelin "Gorges du Tarn - Cévennes Bas Languedoc", p.135-136.

- carte I.G.N. au 1/25.000, 2642 Est.

- carte des monts de Saint-Guilhem-le-Désert au 1/20.000 par J.Couderc. in "Saint-Guilhem-le-Désert et sa région". (voir bibliographie)

- carte Géologique au 1/25.000 par E. BALL., U.S.T.L. Montpellier (1973).

1) GEOGRAPHIE - PAYSAGE

SITUATION - LIMITES

Entre la plaine des Lavagnes (ou de Lacan), où ses limites Nord-Est - Sud-Ouest coïncident avec celles peu marquées de la Séranne, et le village de Saint-Jean-de-Fos installé au débouché des gorges, le Roc de la Vigne (709 m) point culminant d'un ensemble de hautes collines (Puech Bouissou : 635 m, roc de la Jarre : 638 m, Montagresse : 652 m) en constitue le relief central le plus important.

Sur ses contreforts, se développe un important chevelu de ravins et combes encaissées (combe Arnaud, des Arboussets, de Valbonne, de la Blande) dont les sinuosités très prononcées découpe ses avant-monts en de nombreux appendices.

Plus au nord, au pied du Monthaut (656 m), un petit réseau hydrographique (Combe du Caylaret et de la Galinière), au long parcours méandré, descend lentement vers l'Hérault pour donner naissance au canyon pittoresque et sauvage de la combe du Buis (ou du Bouys). Parallèlement à ce dernier, se développe le défilé de la combe du Cor emprunté par la D.4 qui relie les villages de Saint-Guilhem-le-Désert et causse de la Selle (2) Au sud-ouest de cet ensemble, deux importantes échancrures (cirques du Bout du Monde et de Brunan), vastes reculées karstiques ceinturées par de hautes falaises altières, ajoutent au paysage décrit déjà fort imposant, une note pittoresque incomparable. C'est dans la plus verdoyante d'entre elles, arrosée par le petit ruisseau du Verdus (Le vert), que se blottit le village de Saint-Guilhem-le-Désert, haut lieu historique dont l'esthétique parfaite donne un cachet supplémentaire au cadre remarquable qui l'environne. Pour conclure cet ensemble d'une rare pureté de lignes, les gorges de l'Hérault, taillées à l'emporte pièce dans la masse calcaire dolomitique, laissent glisser les eaux capricieuses de leur fleuve vers la plaine de Gignac.

 

 photo : l'entrée des gorges de l'Hérault au "pont du Diable"

LES REGIONS NATURELLES : Un vaste escalier de géant

Sous le regard du roc de la Vigne, découpés à l'emporte pièce dans la masse calcaire, sont structurés morphologiquement un assemblage de 3 grandes régions aux contrastes étonnants. Le village de Saint-Guilhem Le Désert, situé au centre de ce contexte dans un replis verdoyant arrosé par le petit ruisseau du Verdus constitue la seule agglomération de l'ensemble.

région 1 : Le massif du Monthaut et la Plaine de Lacan

Situé dans la partie la plus septentrionale, le massif du Monthaut (656 m) constitue une petite unité montagneuses qui domine de plus de 200 m le ravin des Thières, terminaison sud-sud-ouest de la vallée de la Buèges. A ses pieds, et au Sud, la dépression du mas d'agres, soubassement dolomitique éloignée de toute civilisation, est séparée de l'imposant massif du roc de la Vigne par l'incision sauvage de la Combe Louet, secteur surmontée au S.S.W. par la vaste étendue déserte et sauvage de la Plaine de Lacan. Profilé du N.N.E au S.S.W. et enclavé entre le Roc de la Vigne et le massif de la Séranne cet ensemble érite du style karstique du Larzac méridional repli caussenard hachuré par le faisceau tectonique cévenol. Légèrement basculé vers le S.S.W., et entaillé par un important réseau hydrographique (combe d'Arnaud) issu des pentes du Roc de la Jarre, il constitue le collecteur principal d'un chevelu de thalwegs qui termine sa course sinueuse dans le canyon supérieur du Verdus. C'est dans cette région, tout près du hameau des Lavagnes que s'ouvre la plus profonde cavité du département de l'Hérault (aven de la Capitelle, - 407 m).

région 2 : Le massif du Roc de la Vigne et ses contreforts

Relevant du nez vers l'est, le massif du roc de la Vigne (709 m), région morphologiquement très imposante enlevé au-dessus du replat de la plaine de Lacan et de la combe du Buis, domine le paysage. Ceinturé par une falaise altière au sommet de laquelle on jouit d'un panorama unique sur l'ensemble des garrigues nord-Montpellièraines elle domine un vaste soubassement trapu cisaillé par l'érosion. Combes, ravins, plaines en lanières, ressauts parfois abrupts n'y sont en effet interrompus que par l'imposante incision de l'Hérault vers lequel convergent les grandes unités aériennes de drainage auxquelles elle donne naissance. Son accès peu évident est cependant facilité par un réseau bien entretenu de sentiers ainsi que par une route forestière issue du hameau des Lavagnes.

Photo : Le Roc de la Vigne (versant méridional)

 

Territoire domanial où subsistent encore (malgré de nombreux incendies) quelques rares espèces de résineux (pins Lariçois, Salzmann etc...) le versant Nord surmonte d'une centaine de mètres la plaine de Lacan dont il est séparé par le curieux site du "Pont d'Agres", sorte de croupe étroite à partir de laquelle, naissent de part et d'autres, les combes d'Arnaud et de Louet. Du roc de la Jarre (638 m), monolithe percé inaugurant du N.N.E. au S.S.W. une arrête sommitale à la base de laquelle s'établit le domaine grisâtre de la dolomie, jusqu'au roc de la Candelle (540 m), le paysage, en net contraste avec la strate calcaire blanche et saillante du roc de la Vigne, présente un curieux "musée" de chandelles dolomitiques aux formes souples et arrondies.

Ce secteur pittoresque est traversé au niveau des cols de la Pousterle et du Ginestet par le G.R. 74 qui relie le hameau des Lavagnes au village de Saint-Guilhem-le-Désert. Limite quasiment imposée par le changement brutal de morphologie entre les monts de Saint-Guilhem et le causse de la Selle s'érigeant au N.E. du roc de la Vigne, la combe du Buis, imprimée tel un long serpentin au sein de la dalle calcaire de l'Estagnol, ferme avec la combe du Cor l'horizon morphologique de cette région. Défilé sinueux et encaissés aux falaises trouées de beaumes et d'avens, la combe du Buis constitue à elle seule une des plus pittoresque manifestation karstique des monts de Saint-Guilhem. On lui doit une belle percée hydrologique entre l'aven de la combe du Buis et les émergences situées en rive droite de l'Hérault (Tunnel sous la Route, Tympan, Serpent).

 photo : le cirque du "Bout du Monde" ou "Infernet"

Région 3 : Le massif des Plos (ou des Plaux)

Retombée méridionale du massif, cette région, vaste table calcaire en partie dolomitisée sensiblement inclinée vers le Sud, domine de quelques 150 m la plaine de Gignac qui le long des rives de l'Hérault étend à perte de vue son vignoble. Séparée à l'Est par l'incision profonde des gorges et par un ensemble de petites unités montagneuses ravinées à l'ouest (combe Valloubière, ravin de Rouvignou etc...) ce massif nivelé par l'érosion s'étale au pieds du mont Saint-Baudille sur une superficie de 20 Km2. S'il appartient à la Séranne, et par extension au Larzac sur le plan hydrogéologique, il n'en demeure pas moins associé aux monts de Saint-Guilhem par la continuité morphologique qu'il impose au paysage. C'est dans ce dernier que se développent les grandes galeries richement décorées de la grotte de la Clamouse.

LES GRANDES RECULEES KARSTIQUES : Eloge du "Bout du Monde"

Le cirque de l'Infernet

"Clou" incontestable des monts de Saint-Guilhem, le Cirque de l'Infernet (ou du Verdus, du Bout du Monde), vaste échancrure large et profonde ouverte au sein même de la masse calcaire entre les massifs du roc de la Vigne et des Plos, surprend et étonne les plus blasés. Situé en recul des Gorges de l'Hérault sur lesquelles il s'évase, ce site véritablement grandiose dominé par la haute falaise altière de la Bissonne (515 m), ajoute une note supplémentaire à la nature accidentée de cette région. Du point de vue "Max Négre", accessible à partir de la route forestière des Plos, on peut jouir d'une vue d'ensemble remarquable sur ce dernier . On bénéficie alors, à l'arrière plan, d'un beau panorama sur le roc de la Vigne et l'on peut ainsi mesurer l'ampleur de la saignée profonde que "L'infernet" imprime avec force dans le karst. (2) Avant de se jeter en cascade dans l'Hérault le ruisseau du Verdus issu d'une petite émergence située en fond de reculée arrose le village de Saint-Guilhem-le-Désert érigé à même le prolongement méandré aval de ce site.

Le cirque de Brunan

Modèle réduit et parallèle au précédent, ce cirque forme une échancrure large et profonde dont la base est encombrée d'importants chaos d'éboulis. Difficilement pénétrable en raison de la végétation qui recouvre ses ravines, il demeure un site méconnu très peu fréquenté.

 

photo : le cirque de Brunan

Le cirque de la Balaïssade

Retiré dans les replis du massif, au coeur même de la combe des Frères, ce petit cirque d'une élégance assez rare est ceinturé par une fort belle falaise fermée en fer à cheval. Il s'impose à l'oeil au détour des beaumes Charlotte et de l'Olivier dont les entrées accessibles par un sentier, s'ouvrent sur une vire étroite et escarpée de cette falaise.

 

photo : le cirque de la "Balaïssade". En fond : le Roc de la Vigne

La combe du Buis

Défilé sinueux et encaissé situé entre la plaine de l'Estagnol et le causse de la Selle, cette combe aux chandelles rocheuses croulantes fait partie des paysages les plus sauvages des monts de Saint-Guilhem. Son parcours vers l'Hérault (3 Km environ) découpe avec énergie les strates régulières du rauracien qui s'épanchent, chaotiques et enchevêtrées sur de vastes pierriers abrupts. C'est au sommet de l'un d'entre-eux que s'ouvre l'aven de la Combe du Buis, belle classique de la région.

photo : la combe du Buis (détail sur les falaises de l'aven)

Notes :

(1) Pour des raisons strictement touristico-spéléologiques voires esthétiques et non comme on pourrait le penser géologiques et hydrogéologiques nous avons volontairement dissocié le causse de la Selle des monts de Saint-Guilhem. De ce fait les limites imposées au monts de Saint-Guilhem au niveau de la combe du Cor sont purement arbitraires.

(2) Cette saignée (de plus de 300 m de profondeur) laisse apparaître la coupe stratigraphique des terrains Jurassiques, du Kimméridgien à l'Aalénien sur lequel coule le ruisseau du Verdus.

(voir page suivante : géologie)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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